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Hélène van den Wildenberg
Hélène van den Wildenberg (c) Pascal Schyns

Depuis 15 ans, par le biais de son agence Caracas, elle orchestre avec brio les relations presse des acteurs clés du monde culturel et artistique en Wallonie et à Bruxelles. Quitte, lorsqu'elle le juge nécessaire, à faire valser certains clichés.

L’art, la mode et la création au sens large, vous êtes née dedans ?

Mon intérêt pour l’art est en effet lié à mon éducation. Chez mes parents, il y avait des livres et des œuvres d’art partout. Ma mère était également très avant-gardiste dans ses choix vestimentaires. Très tôt dans ma vie, j’ai compris que la création était un vecteur d’émancipation.

Cette notion d’émancipation fait d’ailleurs partie de vos valeurs et de celles des marques, des institutions et des projets que vous défendez au sein de votre agence.

L’art n’a de sens que lorsqu’il est lié à cette notion d’émancipation. Pour moi, il y a quatre piliers qui définissent la création telle que je l’entends. Les trois autres sont la quête d’innovation, les questions relatives à la nature et toute la subtilité inhérente à la poésie, une autre de mes passions. En termes de collaborations, mes choix sont instinctifs. Je crois en la convergence d’intelligences. Les réflexions purement stratégiques sont, à mon sens, peu porteuses.

Comment choisissez-vous vos projets ?

Dans le registre de l’art, j’ai besoin de percevoir la singularité du projet, son intelligence. S’il s’agit de design ou de mode, il est essentiel de ne jamais perdre de vue le critère économique. De manière générale, il existe trop peu d’aides au développement économique. Or, si un projet n’est pas soutenu commercialement, la meilleure stratégie communicationnelle du monde ne suffira pas à le rendre viable. 

Vous parlez de potentiel commercial. Que faut-il d’autre pour qu’un projet ait une chance de réussir ?

Il doit offrir des solutions concrètes à des problèmes donnés, plutôt que de s’inscrire dans une idée de consommation pure. Lors de mes fréquents voyages en Inde, je suis frappée de constater à quel point ce pays cherche à préserver son savoir-faire. Les objets que l’on trouve là-bas répondent à des gestes du quotidien. Ici, on est envahis par des choses purement décoratives. On vise le matériel, plutôt que l’existentiel. Je crois dans les choses simples que l’on peut transmettre. Ma grand-mère nous disait toujours qu’elle achetait pour trois générations. C’est devenu mon obsession à moi aussi. 

Le fait de vivre avec un artiste - le plasticien Johan Muyle, ndlr.- a changé votre vision du monde ?

L’artiste ne joue pas un rôle. Il crée en accord avec ses propres valeurs. Lorsqu’on partage la vie d’un artiste, on adhère forcément aux siennes. Pour ma part, je vis avec un accumulateur. Son rapport aux objets est lié à ses recherches sur la matière. Vivre entourée de tous ces objets a accentué mon besoin de vide. À son contact, je suis devenue encore moins matérialiste. 

Vous parlez de bon voisinage…

En quinze ans, mon agence a accompagné la majorité des ouvertures de musées en Wallonie et à Bruxelles. Lors de l’ouverture de la Boverie à Liège l’an dernier, les visiteurs de Maastricht sont venus en masse. Pour moi, il est plus porteur de capitaliser sur un creuset existant. D’autant qu’en Wallonie, la dynamique est réelle et très enthousiasmante. L’art, la mode, le design, le théâtre et la danse y coexistent. Les synergies sont nombreuses. Beaucoup trop de jeunes projets reposent sur des montages artificielles, alors qu’il est plus constructif d’envisager l’économie comme quelque-chose de viral. Ma spécificité, c’est mon ancrage dans l’Hinterland : les réseaux Liège/Maastricht/Aix-La-Chapelle ou la zone Mons/nord de la France.

Cette mythologie dont vous parlez prend -t-elle d’autres formes ?

Considérer qu’un artiste doit absolument vivre de son art est une aberration. Tout comme le fait de croire que les entrées payantes devraient suffire à rentabiliser une exposition. Notre monde est rempli de ce type de mythes. Il suffit de jeter un œil aux aliments considérés comme branchés ou bons pour la santé. Souvent, ils sont anti-écologiques par excellence… 

La notion de prix fait également l’objet de beaucoup de fantasmes…

On parle souvent de l’importance de démocratiser le luxe. Ce n’est toutefois pas en cassant les prix et en offrant des produits au rabais qu’on démocratisera vraiment les choses. Il faut plutôt éduquer les enfants, dès l’école. Il faut, à mon sens, privilégier un loisir culturel ou lié à la nature plutôt, comme c’est presque toujours le cas, qu’un loisir de consommation.

Interview de Marie Honnay

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