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Julien Carretero
Julien Carretero

A Milan, le label Belgium is Design présentait des duos d’entreprises et de designers. Les Carrières de la Pierre Bleue Belge et Julien Carretero reviennent sur leur collaboration, entre l’extraction de roche et la création design.

La satisfaction était manifestement au rendez-vous au Salon de Milan. Avec le recul, comment expliquez-vous le succès de votre collaboration ?

Emilie Abraham (pour les Carrières de la Pierre Bleue Belge) : Par notre vif intérêt pour la démarche. Nous sommes convaincus que le design peut apporter un regard alternatif et indispensable sur notre entreprise séculaire. La thématique de l’événement, « A Matter of perception : Tradition & Technology », correspondait à nos propres questionnements sur notre travail. L’invitation de WBDM à travailler dans ce cadre a été accueillie à bras ouverts. Elle a été perçue comme un catalyseur pour le développement de nos produits, de nos méthodes et de nos techniques.

Julien Carretero : Je pratique un design axé sur l’expérimentation, notamment sur l’emploi et le détournement des techniques de l’industrie lourde à l’échelle du design. J’étais très enthousiaste par l’idée d’inclure la pierre bleue dans mes recherches. C’est un très beau matériau, dont la noblesse échappe parfois en raison de son emploi fréquent dans le secteur de la construction. Je suis d’origine française. Si la pierre bleue est banale en Belgique, elle ne l’est pas pour moi. Ceci m’a permis, plus qu’un autre peut-être, de traiter le matériau sans a priori.

Qu’avez-vous présenté à Milan ?

J.C. : Le projet dans son ensemble est un portrait du monde des carrières et de la pierre bleue. Nous avons réalisé des prototypes de mobilier dont une table, une étagère et une lampe, ainsi qu’une série de photos que j’ai prises dans les carrières. A mon sens, le travail réalisé est plus de l’ordre de l’expression d’une réflexion sur le matériau et sur les techniques d’extraction.

E.A. : Oui, au-delà de leurs qualités esthétiques et fonctionnelles, les objets créés par Julien ont la volonté d’exprimer l’échelle et les codes visuels des carrières ainsi que la nature première de la pierre, avant tout travail de finition. L’étagère, par exemple, est composée d’une série de feuilles de pierre dont les bords bruts n’ont pas été rectifiés et qui portent le marquage coloré de leur découpe. Le projet est une mise en scène de la pierre bleue qui incite à porter un nouveau regard sur le matériau.

Et comment se caractérise-t-il, ce regard ?

J. C. : Par son aspect interrogatif, inhabituel et prospectif. Les prototypes nous questionnent car ils court-circuitent le chemin classique entre l’extraction de la pierre et l’objet fini. L’exposition a été une opportunité pour sortir des habitudes, d’appréhender et de façonner la pierre différemment. Je pense qu’ils ouvrent la voie pour d’autres pratiques à décliner pour les produits des Carrières.

Que retirez-vous de cette expérience ?

E. A. : Tout d’abord, une occasion concrète d’ouvrir l’entreprise aux pratiques du design en compagnie d’un professionnel. Nous avons aussi pris conscience des bénéfices qu’un travail de réflexion et d’expérimentation peut apporter. Prendre le temps, en marge de nos activités industrielles, de remettre en question nos pratiques ouvre clairement de nouvelles perspectives.

J.C. : Pour ma part une formidable expérience. J’ai eu la possibilité de m’immerger dans le monde des carrières et d’en appréhender l’échelle gigantesque. L’entreprise a joué le jeu et à mis à ma disposition son expérience dans le domaine.

Quelles sont vos attentes en termes de retombées ?

E.A. : Il est encore trop tôt pour le dire. Milan a été une formidable occasion pour communiquer sur notre activité en Belgique et, dans ce cadre-ci, à l’étranger. Nous exportons actuellement environ 20 % de notre production. S’affirmer en tant qu’entreprise spécialisée dans le contexte international du Salon de Milan va probablement renforcer notre position de leader européen dans le domaine.

J. C. : Je travaille le plus souvent avec des galeries et ma démarche expérimentale concerne un marché de niche. L’ouverture à l’international est donc indispensable. Le brassage professionnel et culturel qui se déroule à Milan va dans ce sens et est apprécié à sa juste valeur.

Sylvie Reversez

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